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Les faux prophètes modernes (Rationalité vs. Mysticisme)

Aristote avait en commun, avec la philosophie bouddhiste, de prêcher la voie du milieu, et de la tempérance.

L’extrémisme, de quelque bord qu’il soit, est un cancer qui ravage les individus, et les sociétés qui les contractent.

« Toutes les vérités ne sont que des demi-vérités ; tous les paradoxes peuvent être conciliés. »

Le Kybalion

L’équilibre ne peut s’atteindre qu’en ayant une vision globale, et en explorant les antipodes opposés.

Voici pourquoi une petite histoire de la pensée moderne s’impose…

La fin de l’obscurantisme

Nous sommes en 1450, et Johannes Gutenberg vient de mettre au point une nouvelle méthode révolutionnaire, qui permet de produire des livres rapidement, et à grande échelle.

Il l’ignore encore, mais l’imprimerie, qu’il vient d’inventer, va bouleverser toute l’Europe.

En divisant drastiquement les coûts, et en augmentant la vitesse de production, le livre va devenir un objet de plus en plus accessible.

Des ouvrages alors uniques, et rares, peuvent être copiés quasiment à l’infini, et la connaissance se répand comme une traînée de poudre.

L’imprimerie va marquer la fin d’une ère sombre, caractérisée par l’ignorance et l’obscurantisme : le Moyen Âge.

La chute de l’empire Romain avait entraîné l’Europe dans un chaos monumental.

L’ordre qui n’était plus, allait laisser place à de nombreuses guerres intestines, et des invasions barbares.

La division allait aussi rendre le continent vulnérable à une nouvelle menace montante, celle de l’Empire islamique, qui s’étendra jusqu’à l’Espagne actuelle.

Comparés aux âges d’or de l’antiquité, il s’agissait d’une régression considérable, et d’une véritable crise existentielle.

Le monopole de la connaissance était alors détenu par l’Église, qui régnait par une main de fer.

Elle imposait son éducation, ses dogmes à respecter, et les infidèles à persécuter.

Les rites étaient souvent prononcés dans un langage étranger à la population.

Les textes sacrés n’étaient accessibles que par l’intermédiaire du Clergé, et son interprétation était indiscutable.

Mais grâce à l’imprimerie, la Bible va devenir de plus en plus accessible.

Elle est même traduite en langage contemporain… et les masses, bien qu’encore pour la plupart illettrés, vont pouvoir la lire par eux-mêmes… et même (Dieu nous en garde…) former leurs propres opinions !

Du fanatisme à la raison

La diffusion de la Bible sera le premier coup porté à la censure, et au contrôle des esprits européens.

Et cet élan se concrétisera par l’avènement du protestantisme, qui dénoncera la tyrannie, le fanatisme, et le cléricalisme de l’Église catholique.

Comme la plupart des révolutions, cette transition se fera dans le sang (notamment dans celui des massacres de la Saint-Barthélemy).

L’histoire est complexe et nuancée, et il y a toujours au moins deux versions des mêmes faits (en réalité, il y en a autant qu’il y a d’observateurs).

L’affaiblissement de l’Église permettra aussi le développement de la libre pensée, de l’illuminisme, de la science, et du culte de la rationalité.

Mais d’un autre côté, c’était également les fondations de la civilisation qui étaient ébranlés.

Et lorsque que l’on trifouille les entrailles d’un système qu’on ne comprend pas vraiment, on risque de le l’endommager fatalement.

(Essayez d’altérer les composants de votre smartphone par exemple, et voyer si vous arrivez à faire quelque chose de productif.)

Avant que les situations ne trouvent leur équilibre, souvent elles oscillent entre deux extrêmes.

L’intégrisme religieux fut contrebalancée par le rationalisme, l’empirisme, le matérialisme, et l’utilitarisme.

Mais ces mouvements finirent par dégénérer en nihilisme, et en scientisme.

Le balancier ayant atteint son antipode opposé, il ne pouvait que rebasculer de l’autre côté.

Et c’est ainsi qu’au XIXe siècle, on vit apparaître de nouveaux mouvements qui ressuscitaient, sous de nouvelles formes, les spiritualités passées.

De la raison au mysticisme

Dans l’histoire de la pensée (comme je l’explique dans mon livre), il existe depuis, au moins l’antiquité, deux courants antagonistes.

Toutes les philosophies peuvent être retracées jusqu’à l’idéalisme de Platon, et au réalisme d’Aristote.

Et toutes oscillent entre ces deux antipodes.

L’ère de la raison, du rationalisme, et du matérialisme… qui est à son comble pendant la Révolution française, va transitionner vers une période plus idéaliste.

En philosophie, cela s’incarnera d’abord dans l’œuvre de Kant.

Le siècle suivant sera un âge d’or, et une véritable renaissance, pour les courants occultes et mystiques, qui enfin ne craignent plus de subir les foudres de l’Inquisition.

Aux États-Unis, on voit apparaître les premiers mouvements transcendentalistes, dont Ralph Waldo Emerson est le principale représentant.

En Russie, la société théosophique voit le jour avec les enseignements d’Helena Blavatsky.

En Allemagne, c’est plutôt l’anthroposophie de Rudolf Steiner qui prend le pas.

En France, on voit une recrudescence des mouvements spiritistes, et l’apparition de génies littéraires (comme Éliphas Levi, Papus, Stanislas de Guaita, Saint-Yves d’Alveydre…) dans les domaines des Sciences Occultes.

De nombreuses sociétés secrètes et initiatiques fleurissent un peu partout, et qui prétendent prolonger l’héritage Maçon, Rose-croix, kabbalistique et Hermétique.

En Angleterre, l’ordre de la Golden Dawn est formé, et comptera parmi ses membres de nombreux occultistes célèbres (comme William Wynn Westcott, MacGregor Mathers, Dion Fortune, Aleister Crowley, Israel Regardie…).

La Grande Époque, cet âge véritablement magique, et idéaliste, sera coupé court avec la Première guerre mondiale, qui apportera avec elle un nouveau vent nihiliste et désenchanté.

La dégradation des mystères

Le balancier ayant atteint son apogée idéaliste, il devait forcément revenir dans l’autre sens, avec encore plus de violence.

À l’heure de la guerre, on n’a plus le temps de s’intéresser aux anciens classiques, à la mystique, et à la résurrection des traditions perdues.

La course est à l’armement, et à une seconde vague d’industrialisation massive et précipitée.

Face à tant de destruction, la foi se perd.

Au milieu des ruines, on redevient pragmatique.

Le melting-pot idéaliste se dégrada pour devenir ce qu’on appelle aujourd’hui la philosophie « New Age », ou nouvelle-âgiste.

Elle apportera avec elle de nombreuses dérives sectaires, et une foule de cultes, dirigés par des gourous, pas toujours très honnêtes.

Connaître l’histoire de la philosophie, et les racines antérieurs à ces mouvements naïfs, peut éviter de tomber dans pas mal de pièges qui incombent la spiritualité moderne.

Il n’y a rien de nouveau sous le soleil…

Et toutes ces doctrines contemporaines ne sont que des reformulations simplifiées, et édulcorées, d’une tradition beaucoup plus ancienne, et qui avait commencé à être excavée par les savants de la Grande Époque.

La mouvance nouvelle-âgiste, frôlant souvent de près le ridicule, et par son manque de rigueur, donna tous les arguments aux matérialistes pour imposer leur philosophie.

L’ésotérisme de XXIe siècle connaîtra des absurdités qui engendrerons notamment la société de Thulé (le culte des nazis), l’Église de Satan, la Scientologie, la Wicca, ou encore le Mouvement raëlien.

Mais l’histoire semblant s’accélérer avec l’essor des technologies d’information et de communication… un sursaut idéaliste refit surface à la fin du siècle.

Knowledge-doubling curve

Il fut galvanisé notamment par les nouvelles découvertes en physique, et la révolution psychédélique.

Plusieurs physiciens, de première classe, de l’époque, remettaient en cause l’approche matérialiste.

Et on verra, par exemple, nombre de partisans de l’interprétation de Copenhague (comme Bohr ou Heisenberg) affirmer que c’est la conscience qui effondre la fonction d’onde des particules… et que c’est l’esprit donne à la matière sa tangibilité.

Quant à la révolution psychédélique, portée par des chercheurs comme Timothy Leary… elle promettait à chacun de pouvoir vivre des expériences transcendentales, et mystiques, par voie pharmacologique.

L’éternel débat se poursuit

Chacun des courants mentionnés précédemment mériteraient un livre entier pour pouvoir être traités exhaustivement… et pour pouvoir en saisir toutes les nuances.

La guerre entre idéalisme et réalisme perdure encore aujourd’hui, et nous ne sommes pas près de voir son bout.

Les deux camps ont des arguments pertinents.

Mais sa résolution sera toujours mitigée, parce que les deux courants philosophiques partent d’axiomes improuvables.

On ne peut tester l’axiome idéaliste qui dit que l’univers n’existe que dans l’esprit de celui qui le perçoit, parce qu’il faudrait alors totalement supprimer le monde.

Et on ne peut tester l’axiome matérialiste qui dit que l’univers existe indépendamment de la conscience, parce qu’il faudrait alors totalement supprimer l’esprit.

Ces deux propositions sont improuvables, parce qu’intestables (du moins par la méthode scientifique).

En supprimant le monde, l’esprit n’aurait plus rien à observer.

Et en supprimant l’esprit, il n’y aurait plus de monde à percevoir.

Je fais de mon mieux pour donner une perspective impartiale de différents points de vue.

À chacun de juger par lui-même.

Mais je ne crois pas à la pure objectivité, et forcément j’introduis mes propres biais à mes démonstrations (comme tout le monde).

(Fuyez les gens qui pensent avoir la vérité absolue, parce que ce sont des fanatiques.)

Donc si je veux être totalement honnête, je dois révéler où est-ce que je me situe sur le spectre.

Eh bien… suspense…

Je penche plus vers l’idéalisme, mais de façon modérée (bien que j’accepte aussi nombre de perspectives réalistes et matérialistes).

Des outils à penser

En réalité, je pense que les deux perspectives sont utiles en fonction des domaines.

Les théories ne sont que des outils à penser.

Et chaque outil a son utilité en fonction des circonstances.

Si vous voulez envoyer une roquette sur la lune, la physique newtonienne est suffisante.

Mais si vous voulez construire des processeurs, la physique quantique sera plus adaptée.

Pour tout ce qui concerne l’ingénierie, et l’étude des lois physiques, la philosophie matérialiste est évidement plus performante.

Mais pour toutes les questions de morale, elle est vide, nihiliste et obsolète.

Pour savoir comment agir dans le monde, sans créer un enfer sur terre, la philosophie idéaliste est beaucoup plus appropriée.

En réalité, tout l’effort de la science, et du réalisme… c’est justement de laisser l’esprit, et ses jugements subjectifs en dehors de l’équation.

Le problème c’est que si le monde que l’on expérimente résulte d’une symbiose entre l’esprit et la matière… alors en ignorant la conscience, on laisse de côté la moitié du problème.

La chose est parfaitement illustrée dans l’ouvrage de Jordan Peterson, Maps of Meaning  :

« The world can be validly construed as forum for action, or as place of things. »

La vérité scientifique, et matérialiste, sert à savoir de quoi est constitué le monde.

La vérité religieuse et idéaliste (ou encore pragmatique, existentialiste et phénoménologique) sert à savoir comme agir dans le théâtre de l’existence.

Traiter la Bible (ou n’importe quelle œuvre littéraire), comme l’on traitre un papier ou une expérience scientifique, c’est juste être totalement à côté de la plaque.

On n’utilise pas une règle graduée pour mesurer une température.

Et on n’utilise pas une équerre pour juger d’une altitude.

Il faut un outil adapté à la chose qu’on essaye de mesurer, ou d’accomplir.

Les zombis du quotidien

Il y a une attitude qui est extrêmement agaçante, qu’on rencontre souvent, et qui consiste à juger de choses qu’on ignore totalement.

Exemple :

Un soir d’halloween, un de mes amis décide de se déguiser en prêtre, et me demande si je peux lui prêter une Bible.

J’arrive donc en avance dans un bar avec le livre en main.

Un boomer me fait alors la réflexion que je devrais m’en débarrasser.

Dieu merci, on vit dans un pays où c’est encore légal de lire la Bible (ce n’était pas le cas dans la plupart des pays communistes, et encore aujourd’hui dans les pays infectés par l’islam radical).

Cet idiot narcissique est assez arrogant pour croire qu’il peut juger d’un livre qu’il n’a sûrement pas lu.

Il se pense assez intelligent pour pouvoir remettre en cause l’ensemble des racines de la civilisation occidentale, et que sa théorie de soixante-huitard nihiliste, vaut mieux que la morale ancestrale, qui guide l’humanité depuis plus de 2000 ans.

Je ne fais pas de prosélytisme, et je ne suis en croisade pour convertir les infidèles (et j’ai même horreur des chrétiens fondamentalistes fermés d’esprit).

Mais un peu d’humilité !

Personne ne comprend totalement la Bible.

Ses interprétations sont infinies, et ses perles de sagesses nombreuses.

Le voile du mystère ne sera jamais totalement percé.

Et parfois, certaines histoires ne parlent pas à votre intellect, et à votre rationalité… elles parlent à votre âme !

Mais c’est clair que pour ceux qui en sont dépourvus, il n’est pas étonnant que le message tombe dans l’oreille d’un sourd.

Conclusion

Chacun voit midi à sa porte.

On n’écoute que les arguments qui confirment nos préconceptions.

Le symbolisme religieux, mystique, mythologique, et onirique… a été étudié en profondeur par des chercheurs rigoureux comme Carl Gustave Jung, Mircea Eliade, James George Frazer, Joseph Campbell…

Avant d’être totalement articulé, le savoir est intuitif.

Il s’incarne d’abord par des mythes, des légendes, et des symboles mystérieux.

L’ambiguïté est justement la meilleure façon possible d’exprimer des vérités ineffables.

Mais avant de pouvoir trouver de la valeur dans ces représentations étranges, il faut d’abord apprendre à ouvrir son esprit.

« La science, c’est la croyance en l’ignorance des experts. »

— Richard Feynman

Il faut reconnaître que nos croyances qu’on pense rationnelles… sont aussi des dogmes…

Et que le fanatisme n’est pas que religieux, il peut aussi être scientiste.

— Geoffroy

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Qui est Geoffroy Stec ?

Je suis designer et éditeur depuis 2018. J’aide les créatifs à monétiser leurs passions, et à construire des systèmes de rémunérations durables.


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Comprenez les différents paradigmes et les révolutions scientifiques. Épistémologie et science.

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