Le monde change de plus en plus vite.

Les façons dont l’homme survit dans son environnement évoluent aussi.

L’effet de levier le plus important n’est pas la force brute, c’est l’intelligence, et la technique.

« Donnez-moi un point fixe et un levier et je soulèverai la Terre. »

— Archimède

C’est en maîtrisant votre esprit, et votre attention que vous pouvez concentrer votre énergie en un point précis, et ainsi devenir incisif.

Opérer son système nerveux

Dans la tradition hermétique, le mental est souvent symbolisé par une épée, parce qu’affuté, il devient tranchant.

Niranjanananda Saraswati, un swami indien, trace une comparaison similaire dans son Dharana Darshan.

Il dit que l’attention peut être diffuse, comme une lampe classique, ou bien qu’elle peut être hyper-focalisée sur un point, comme un laser perçant.

Les deux sont des modes de cognition différents.

Dans le premier, l’esprit vagabonde sans objectif clair, autre que celui de la récupération.

Les neuroscientifiques définissent de cet état comme le « Default Mode Network » (DMN), ou le « réseau du mode par défaut ».

Dans le deuxième mode, l’esprit est concentré activement sur une activité extérieure, souvent au point de s’oublier soi-même.

On parle alors plutôt de « Task-Positive Network » (TPN) ou de « réseau à tâches positives ».

Cette dichotomie est aussi conceptualisable par la séparation du système nerveux sympathique, avec celui parasympathique.

Apprendre à se servir de son esprit, et de son système nerveux est fondamentale pour pouvoir survivre à son environnement.

Votre cerveau est votre plus gros atout.

C’est grâce à lui que vous êtes au sommet de la chaine alimentaire.

L’évolution a permis à l’homme d’être le mieux adapté, malgré sa fragilité embarrassante par rapport au monde animal.

Résistance aux maladies, au froid, au chaud, force physique, défenses naturelles, rapidité… là n’est pas notre point fort.

Mais tout ces défauts sont surplombés par l’intelligence.

C’était déjà vrai quand nous vivions dans la nature sauvage.

Mais aujourd’hui, c’est encore plus le cas.

Pourquoi ?

Parce qu’on ne vit plus dans des jungles.

Nous habitons principalement des espaces sémantiques.

Les nouveaux territoires abstraits

La survie aujourd’hui se joue plutôt sur un plan conceptuel.

“The purpose of thinking is to let the ideas die instead of us dying.”

― Alfred North Whitehead

On pense pour laisser nos idées mourir à notre place.

C’est encore plus vrai dans les sociétés industrialisées, et technologiquement surdéveloppés.

On ne chasse plus avec nos bras et nos jambes, mais plutôt avec nos neurones.

Pourquoi ?

Parce que toutes les solutions mécaniques deviennent automatisables.

Les humains se font progressivement remplacer par des machines, et l’IA.

Les ressources matérielles sont de plus en plus abondantes.

Mais il y a une chose que les robots sont encore loin de remplacer.

Quoi donc ?

La créativité, et la signification.

Nous, humains, sommes obsédés par la quête de vérité (notre survie en dépend).

Toutes les sciences, les religions, et les philosophies existent pour donner du sens à la vie.

Contrairement à nous, une IA comme ChatGPT se fout totalement de ce qui est vrai.

Elle est juste programmée pour donner l’illusion sémantique du vrai (ou pour répéter ce qu’on sait déjà).

Elle ne peut donc pas générer d’idées nouvelles, et raisonne par « hallucinations » et par stéréotypes.

La valeur de l’information

D’où vient la richesse ?

D’une combinaison de labeur, de capital, et de terres diraient les marxistes.

C’est en partie vrai, mais il manque un élément fondamental :

La production est en réalité la mise en application d’idées pratiques et ingénieuses.

Un jour, un homme préhistorique s’est dit qu’au lieu de se fatiguer à chasser et à courir derrière des bêtes, il pourrait plutôt les capturer, et créer des élevages.

En observant, et en comprenant instinctivement quelques principes simples de biologie, il a réussi à considérablement élever ses chances de survie.

Tout ça grâce à son esprit, et à sa créativité.

À chaque nouvelle invention, nous économisons du temps et de l’énergie, qui peuvent alors être alloués ailleurs.

La véritable valeur ne se trouve pas dans le travail mécanique, mais dans la génération d’idées, et la stratégisation.

On en revient aux effets de levier.

Quand on sait où précisément appliquer son attention et sa force, on peut soulever des montagnes avec le petit doigt.

Si vous essayez de gagner votre vie en accomplissant répétitivement des tâches mécaniques, en cumulant des heures de travail insignifiantes, par votre apparence, votre statut social, ou n’importe quel autre ressource matérialiste… alors vous serrez toujours à la traine dans cette nouvelle économie.

Nous sommes dans l’ère de l’information, et les nouveaux riches seront ceux qui apprennent à dealer des bits, et à créer du sens.

Vous devez apprendre à gagner avec votre esprit, et pas avec vos bras remplaçables.

Optimiser ses ressources

Comment se servir de sa tête ?

Pour en revenir aux deux modes de cognition, il est important de bien les comprendre, afin d’optimiser ses ressources.

Souvent on pense que pour être productif, il faut faire le maximum d’heures possibles, en un minimum de temps.

Mais la recherche semble montrer que pour les tâches cérébrales, ce n’est pas la bonne approche.

Le repos actif est aussi important que le travail intensif.

Pourquoi ?

Parce que c’est quand vous vous reposez que vous activez le DMN (Default Mode Network).

La récupération ne signifie absolument pas l’inactivité.

Même en dormant, votre cerveau reste très actif.

Si vous regardez les routines des personnes les plus productives et les plus créatives, vous verrez qu’elles portent une attention particulière à des choses que beaucoup considèrent comme une perte de temps.

Elles ne négligent ni le repos, ni le sommeil, ni l’activité physique, ni les loisirs, ni la récupération, ni le jeu…

Toutes vos meilleures idées vous viennent quand vous ne faites rien, que vous glandez, et que vous faites tout sauf ce qui ressemble à du travail.

Nous vivons dans une culture qui semble favoriser celui qui arrivera à déployer le plus d’effort, le plus longtemps possible, indépendamment du résultat final.

Comme si celui qui souffrait le plus était le plus vertueux… (Comme l’affirme la « morale d’esclave » de Nietzsche.)

Mais en réalité, c’est juste un signe de stupidité, et de conformisme.

Si vous êtes réellement focalisé sur les résultats, vous devez faire le moins d’efforts inutiles, et gaspillez le moins de temps possible.

La valeur du temps

Ceci est contre-intuitif dans un système qui vous a appris à échanger votre temps contre de l’argent.

Si vous y réfléchissez 5 minutes, vous verrez que c’est absurde.

Pourquoi ?

Parce que si je suis payé à l’heure, et bien cela signifie que je suis récompensé pour la lenteur, et l’inefficacité.

Exemple :

Vous êtes freelance, vous avez une mission.

Si vous pouvez faire le même travail en 2 jours, ou en 2 semaines, quelle prestation à le plus de valeur ?

Celle délivrée en 2 jours, n’est-ce pas ?

Le résultat est le même, mais aboutit plus rapidement.

Si les gens ne valorisaient pas la vitesse, Amazon n’aurait pas vendu 230 millions d’abonnement à Amazon Prime en 2023 (Source).

Dans le monde du salariat, l’employé est moins bien payé pour une livraison rapide, puisqu’il est rémunéré à l’heure.

Plus il prend de temps à faire la même tâche, mieux il est payé.

Donc oui, c’est absurde.

Et en tant qu’entrepreneur, cela ne fait aucun sens.

Mais ce principe s’applique aussi la productivité personnelle.

La recherche indique que le temps de travail optimal, pour la productivité mesurée sur le long terme, est entre 3 et 5h, par jour ! (Source.)

Faire des heures, c’est en réalité bien pour les machines, et ceux qui font des boulots répétitifs, comme un robot sur une chaine de production.

5h par jour, c’est difficile à accepter quand on baigne dans la « hustle culture ».

L’équilibre productif

Charles Darwin a écrit 19 livres dans sa vie, en travaillant ce nombre d’heures quotidiennes.

Kant écrivait 3h chaque matin, et a révolutionné la philosophie.

Au-delà, vous pédalez à contre-courant, et épuisez vos ressources.

Si vous voulez atteindre le pic de votre performance, il vous faut un système de productivité, et aussi un système de récupération.

(Un système est une série d’actions qui mène à un même résultat.)

La vie est un équilibre entre tension et lâcher-prise.

Quand vous travaillez sur un problème, vous devez engager vos deux modes de cognition (RMN et TPN).

Les périodes d’effort intensif doivent se coupler avec des périodes de récupération profonde.

La créativité est stimulée par le repos actif.

Votre subconscient continue à travailler pour vous quand vous cessez de vous focaliser sur vos problèmes.

Et ce dernier a accès à beaucoup plus de ressources que votre esprit conscient.

L’intuition et l’inspiration ne sont pas des facultés qui se développent par la coercition.

Au contraire, elles sont stimulées quand vous abandonnez le besoin compulsif de contrôle.

Vous devez développer vos deux types de muscles : ceux qui vous servent à contracter, et ceux qui servent à détendre.

Penchez trop vers un extrême et vous devenez constipé, ou à l’antipode et devenez flaccide.

Stimuler la créativité

Comment trouver des solutions et des idées originales ?

D’abord en consommant celles des autres.

Les personnes qui créent du nouveau, à partir de rien sont extrêmement rares (si elles existent).

Les pensées que vous entretenez ne sont pas les vôtres.

Vous les avez contractées dans la culture, ou plus précisément dans « l’idéosphère », pour prendre les termes de la mémétique.

C’est aussi une violation des lois de la physique, qui dit que :

« Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. »

— Antoine Lavoisier

Carl G. Jung pensait que les gens « n’avaient » pas des idées ; mais plutôt qu’ils étaient possédés par des idées.

Par quels concepts, quelles philosophies, et quelles idéologies les masses se laissent-elles posséder ?

En réalité, le langage s’apprend par imitation.

Penser, ce n’est que réarranger une structure déjà existante.

Les meilleurs auteurs, et les meilleurs scientifiques sont des personnes qui ont énormément lu elles-mêmes.

Les IA qui modèlent le langage sont entraînées sur des bases de données.

Et plus ces dernières sont larges, mieux elles arrivent à simuler la cohérence, et la créativité.

C’est pareil pour vous : plus vous consommez d’informations significatives, meilleur vous devenez à articuler des concepts et des solutions.

Moduler son tunnel de réalité

Ce que vous percevez est conditionné par votre perspective, et par ce que vous cherchez à accomplir.

Si vous êtes créateur, la façon dont vous consommez du contenu est très différente de quelqu’un qui n’a pas l’esprit entrepreneurial.

Même en regardant du divertissement, vous avez un angle d’approche particulier, et vous allez remarquer des choses que vous pourriez implémenter.

Vous vous inspirez de la technique, des mécanismes de rétention d’attention, de la direction artistique, du message…

Vous cessez d’être passif, parce que vous interprétez l’univers avec une lentille différente.

De la même façon, un entrepreneur qui échange avec une entreprise n’est plus un simple consommateur. Il devient aussi un analyste.

Au lieu de simplement acheter, il se demande comment elle fait du profit, et voit s’il peut en tirer des leçons.

C’est pour cette raison qu’il est si important d’avoir une vision, et un plan pour l’avenir.

Parce que sans eux, l’information que vous percevez n’a pas de sens.

En réalité, vous ne percevez même pas consciemment les signaux que vous jugez insignifiant.

C’est aussi pour ça qu’on dit que les artistes ont un œil particulier : parce qu’ils voient littéralement différemment.

Tous les grands maîtres ont commencé en copiant les classiques.

Une fois qu’ils les ont intégrés, à force de répétitions, ils peuvent créer leur propre style.

Mais pour arriver à ce stade, il faut d’abord répéter les bases, jusqu’à ce qu’elles deviennent inconscientes.

Conclusion

Le système d’éducation actuel ne jure que par la spécialisation, et le réductionnisme.

Pourquoi ?

Parce qu’il est censé former des masses salariales héritées de l’ère industrielle.

Sur une chaine de production, vous devez être compétent à une seule chose bien précise, et c’est tout.

Avant la modernité, tous les savants étaient polymathes, et avaient une multitude d’intérêts variés.

Nous avons passé l’ère industrielle.

La nouvelle révolution est informatique.

Cette ère est celle de la communication.

Et dans un tel paysage, il vaut mieux être un généraliste, qu’un spécialiste.

Le temps des emplois prestigieux dans de grandes sociétés semble décliner.

Même la tech continue à licencier, à cause de l’automatisation, et de la sous-traitance vers le tiers monde.

On parle de plus en plus de l’économie des créateurs, vers laquelle nous sommes en train de transitionner.

Si vous vous lancer dans celle-ci, vous allez devoir apprendre tout un tas de choses variées :

• Les réseaux sociaux
• La persuasion
• La création d’offre
• L’écriture
• La vente
• La création de contenu
• Le marketing
• Le design
• L’infographie
• Le code
• La vidéo
• …

Cette nouvelle ère est la culmination finale de l’esprit individualiste, et entrepreneurial.

Aujourd’hui, grâce à internet, chacun peut vivre de sa créativité, de sa passion… et créer une carrière alignée avec sa curiosité, et ses centres d’intérêts.

Mais à condition d’avoir le courage de suivre sa propre voie, plutôt que celle dicté par la société, vos professeurs, ou vos parents (qui vivent encore dans l’ancien monde).

— Geoffroy