La plupart pensent que nos modèles scientifiques récents ont complètement rendu obsolètes nos modèles traditionnels.
Ils pensent que la science a déprouvé la cosmogonie religieuse et mythologique, et jubilent l’érection du matérialisme.
Précédemment, nous avons traité cette question du point de vue éthique, en montrant la catastrophe qu’a entrainée ce changement de paradigme.
Maintenant nous attaquons cette problématique avec justement les armes de nos adversaires : la logique.
Nous allons démontrer les incohérences du raisonnement matérialiste, cartésien et essentialiste ; pour ensuite ressusciter l’approche holistique et idéaliste.
Nos modèles de réalité
Je l’ai déjà répété mille fois, mais nous n’avons aucune preuve que le monde existe à l’extérieur de nous-même.
On ne peut pas séparer le sujet de l’objet. Ils sont interdépendants et ne peuvent exister l’un sans l’autre.
Sans conscience pour le percevoir, le monde n’a aucune tangibilité.
Même les concepts d’espace et de temps sont des constructions mentales ; et il en est de même pour toute théorie scientifique.
Nos modèles du monde sont des abstractions qui n’ont pas d’existence en soi.
Nous utilisons différents modèles du monde en fonction de ce que nous cherchons à accomplir.
La physique Newtonienne est suffisante pour envoyer des fusées sur la lune, mais elle devient obsolète au niveau subatomique.
Vous savez que la terre n’est pas plate, pourtant vous utilisez constamment des plans en deux dimensions (des cartes) pour vous orienter.
Einstein a démontré que l’espace était courbé, pourtant on utilise toujours la géométrie euclidienne.
Nos différents modèles du monde ont différentes utilitées selon les circonstances.

Aucun modèle n’est complet
Imaginez que l’on représente différentes cartes d’une même ville.
Certaines montrent le réseau routier, d’autres indiquent le relief, une autre la démographie, une autre la température, une autre les égouts…
Chaque carte a son utilité dans un contexte précis, mais aucune carte n’est fondamentalement plus vraie qu’une autre.
Aucune carte ne peut représenter la ville telle qu’elle est.
Pour représenter la ville telle qu’elle est véritablement, il faudrait inclure une infinité d’information (ce qui la rendrait illisible).
Il faudrait inclure chaque objet et chaque atome la constituant, les perspectives de chaque individu, la faune et la flore urbaine, les centaines de différents types de réseaux de communication… Il faudrait également indiquer comment elle était il y a 100 ans, il y a 10 ans, il y a 15 minutes… comment elle est en relation avec les autres villes, les autres planètes, les autres galaxies…
Seule la ville est égale à elle-même.
La seule description correcte et complète de l’univers est l’univers lui-même.
L’existentialisme
Par ce petit exemple, nous venons de résumer le postulat de la philosophie existentialiste.
L’existence précède l’essence.
Les choses n’ont pas d’essence en soi, mais nous leurs en attribuons une après en avoir fait l’expérience.
C’était le défaut majeur de la philosophie aristotélicienne : elle assumait une existence aux choses indépendamment de la perception.
Kant fut un des premiers à formuler cette critique dans Critique de la Raison Pure.
Le problème est que la majeur partie des gens pensent encore de façon aristotélicienne.
Le dogmatisme et le fanatisme sont des virus mentaux qui sont la conséquence de ce fait.
Lorsque vous attribuez une essence aux choses, quand vous dites « c’est comme ça », vous tuez votre intelligence, votre curiosité, et votre esprit critique.
C’est le piège de toutes les religions (y compris la religion matérialiste). C’est de penser que les cartes qu’elles proposent représentent objectivement la réalité.
La science ne représente pas objectivement la réalité !
Aucun de vos modèles ne le fait.
Savoir cela vous offre énormément de flexibilité, et vous permet de sauter d’un paradigme à un autre, sans éprouvez de contradiction.
Vous savez que l’on n’utilise pas un thermomètre pour mesurer une distance, et que l’on n’utilise pas un microscope pour regarder dans l’espace.
Pourtant certains utilisent un paradigme scientifique pour juger un paradigme religieux, et vis-versa.
La relativité
Ce que l’on considère comme vrai dépend donc du paradigme que l’on utilise.
Une vérité dépend du système qui l’encadre.
Indépendamment de son système, une vérité n’est que du bruit sémantique.
J’utilise souvent l’expression « bruit sémantique ».
Le « bruit », chez Shannon, fait référence aux artefacts qui viennent perturber la transmission d’un message (voir mon article sur la communication percutante).
Le « bruit sémantique » signifie un message incohérent, qui a des contradictions logiques.
« Demain le paradis roule à deux mains » est un exemple de bruit sémantique : ça ne veut rien dire car la phrase ne respecte pas la structure de la langue.
À chaque fois que l’on assume une essence aux choses, on introduit du bruit sémantique, et des erreurs de logiques.
Chaque modèle de l’univers est un système clos avec ses propres règles de logique. Les règles d’un système ne s’appliquent pas à un autre.
Ceci a été démontré mathématiquement par Gödel. Chaque système repose sur un axiome improuvable et est donc forcément incomplet.
Je détaille tout ceci dans mon livre Manuel d’Hygiène Mentale, où je cite d’autres exemples venant des sciences qui appuient cet aphorisme d’Alfred Korzybski : La carte n’est pas le territoire.
Parmi ces exemples, qu’on ne peut développer ici, on trouve :
- La relativité d’Einstein.
- Les fentes de Young, la dualité onde-corpuscule, et l’interprétation de Copenhague.
- Le théorème de Gödel.
- Le principe d’incertitude d’Heisenberg.
- Le théorème de Bell, et la non-localité.
- La théorie du Chaos
Tous ces systèmes contredisent l’approche matérialiste, justement par la physique et les mathématiques.
La relativité dit que le temps et l’espace varient en fonction la vélocité et de la gravité, et ne sont donc pas absolues.
L’interprétation de Copenhague affirme que l’état d’un photon dépend de l’observateur.
Le théorème de Gödel montre qu’aucune vérité mathématique est absolue.
Le principe d’incertitude stipule qu’on ne peut mesurer précisément la position et la vélocité d’une particule en même temps.
Le théorème de Bell démontre que les particules peuvent évoluer indépendamment de l’espace-temps.
La théorie du Chaos dit que chaque centimètre contient un nombre infini de dimensions.
L’idéalisme et la science occulte
Voici les arguments de la science contre l’approche matérialiste, mécaniste, déterministe et réductionniste ; bien que les philosophes n’aient pas attendus la physique moderne pour y adresser leurs critiques.
Les découvertes scientifiques ne sont pas en contradiction avec la philosophie occulte, au contraire on peut trouver beaucoup d’analogies.
Chaque système a au moins un axiome métaphysique.
L’axiome métaphysique de la science (et du matérialisme) est qu’il existe un monde objectif indépendamment de la perception.
Le matérialisme est basé sur un dogme improuvé, autant que les religions qu’il dénonce.
Toute cette démonstration peut être résumé par la première lois du Kybalion :
L’univers est mental.
Dans la philosophie occulte, le monde est la projection mentale de l’Esprit du Tout. Ce n’est pas tant que Dieu crée le monde, mais plutôt que Dieu devient le monde.
L’analogie avec la théorie du Big Bang est tentante, si l’on remplace le mot Dieu (qui est surchargé sémantiquement) par énergie.
L’énergie crée le monde, est partout et en tout, et anime l’expansion de l’univers.
Il n’y a qu’une seule énergie qui se manifeste sous plusieurs formes.
Celle-ci a créé le monde, elle anime les êtres vivants, elle circule dans nos câbles et nos appareils électriques, elle déplace les planètes, elle éclaire le monde, elle est dans l’air et permet les télécommunications, elle rend solide les atomes… Elle est la force qui s’oppose à l’entropie et au chaos.
Cette énergie a un lien étroit avec la conscience (celle-ci influence le comportement des photons selon l’interprétation de Copenhague).
Cette même énergie se transforme en particules élémentaire (bosons, quarks, photons…), pour former les atomes qui constituent la matière.
Les forces fondamentales
Pareillement, dans la philosophie occulte, la nature est hiérarchisée selon un ordre céleste.
L’énergie se transforme à travers différents plans invisibles (invisible comme les atomes) pour former le monde.
Les deux métaphores suivent la même structure.
Les éléments fondamentaux de la philosophie occulte ne sont pas des quarks et des électons. Ils sont plutôt :
- les 4 éléments,
- les 7 planètes,
- les 12 constellations du zodiac,
- les 78 arcanes du tarot,
- et les 360 degrés du ciel.
La différence majeure entre les deux métaphores est que le modèle des anciens conceptualise ces forces comme dotées d’intelligence.
Selon les traditions, ces forces sont représentées comme des dieux, des anges, des démons, des esprits, des élémentaux…
Ainsi chaque aspect de l’existence est gouverné par une entité, et a des correspondances dans le monde physique et invisible.
Comme le dit le Kybalion :
Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas.
Les parallèles
Peu de physiciens, à ma connaissance, ont tenté de tracer des correspondances entre la physique moderne et la kabbale.
Par contre, ils sont nombreux à avoir croisés les découvertes récentes avec les philosophies traditionnelles orientales.
C’est le cas, par exemple, de Fritjof Capra dans Le Tao de la physique (qui reste une interprétation philosophique).
Nous avons aussi John Hagelin, qui lui va même jusqu’à dire que la physique moderne calque parfaitement la cosmogonie hindoue.
Parmi les occultistes classiques, ils sont quasiment unanimes. Blavatsky, Crowley, Papus, pour n’en citer que trois, étaient persuadés que toutes les découvertes contemporaines n’étaient que la résurgence des théories des anciens initiés.
Selon-eux, ils avaient déjà une connaissance approfondie de l’électricité, du magnétisme, de la chimie…
Ils savaient très bien que la terre était ronde, et que le soleil était au centre du système solaire.
Le modèle géocentrique n’a jamais été une description scientifique de l’univers.
Il s’agit d’une carte de l’âme, de l’homme, et des énergies qui le constitue.
Phénoménologiquement, vous êtes le centre de l’univers que vous habitez, et les astres sont les forces qui animent votre psyché.
Agrippa explique ce paradigme d’une façon on ne peut plus claire :
« La forme et les vertus proviennent donc d’abord des idées, ensuite des intelligences qui président et gouvernent ou conduisent, ensuite des aspects des cieux, et enfin des complexions des Eléments, lesquels étant disposés correspondent aux influences des cieux. »
La philosophie occulte – Agrippa, Chap. XIII – Vol.1
Comme les forces et les particules fondamentales de la physique moderne :
« les Eléments sont non seulement dans toutes les choses d’ici-bas, mais même dans les Cieux, dans les Etoiles, dans les Esprits, dans les Anges, et en Dieu même, qui est le créateur et l’auteur de toutes choses. »
La philosophie occulte – Agrippa, Chap. XIII – Vol.1
Les grandes allégories
Les deux modèles (scientifique et occulte) assument un état de non-existence avant la création du monde. Puis de ces ténèbres, une immense étincelle jaillit et le monde apparait.
Encore une fois ce n’est qu’une métaphore.
Le temps, l’espace et la matière sont des illusions de l’esprit.
L’infini (et l’univers) n’a ni commencement, ni fin.
Seulement, il impossible de signifier quoi que ce soit sans se servir d’une chronologie. Cette phrase que vous lisez suit un ordre précis, sans lequel elle ne ferait aucun sens.
Le temps, l’espace et la matière ne sont que des instruments de mesure de l’énergie et de l’information.
Pareillement, les concepts de dieux, d’anges, de démons, de séphirothes, d’égrégores… sont des métaphores qui servent les mêmes fins.
Crowley l’énonce en ces termes :
“In this book it is spoken of the Sephiroth and the Path, of spirits and conjurations, of gods, spheres, planes and many other things which may or may not exist. It is immaterial whether they exist or not. By doing certain things, certain results follow; students are most earnestly warned against attributing objective reality or philosophical validity to any of them.”
Aleister Crowley — Magick in Theory and Practice
Penser de façon non-arstotélicienne
A quoi ça sert de savoir tout ça ?
Le fait de comprendre que nos modèles sont incomplets permet un certain détachement envers ceux-ci.
Être sûr et certain d’un chose, c’est figer son intelligence.
Quand on se rend compte que nos modèles sont des illusions, nos certitudes se ramollissent. Le fanatisme et le dogmatisme se tarissent.
Le sens de l’humour s’en retrouve exalté. Nos idées deviennent flexibles et ludiques.
On devient également moins sensible à la manipulation, à l’idéologie et à la possession. Les certitudes des autres ne nous atteignent plus, nous sommes moins naïfs, nous pensons alors par nous-même.
Et finalement, le fait de briser le dogme matérialiste restaure un sentiment d’unité et d’harmonie avec toutes choses.
On se souvient que l’esprit est présent en chaque chose, et qu’il interconnecte tout ce qui existe.
En bref, on est plus heureux.
La Science, qu’elle soit occulte ou contemporaine, n’est pas un dogme.
Elle est une méthode.
Appliquez les méthodes, et jugez par vous-même de l’efficacité de celles-ci.
Maintenant que vous savez que chaque modèle du monde est illusoire, vous pouvez choisir de créer votre propre modèle, qui sert vos propres intérêts ; plutôt que d’accepter le modèle qui sert l’intérêt d’un autre.
Il n’y a pas de réalité objective, c’est vous-même qui créez votre propre synthèse subjective.
— Geoffroy
PS : Voir mon livre Manuel d’Hygiène Mentale, pour approfondir ces sujets